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Dossier n°

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 » Mes parents l’ont fait parce qu’il fallait le faire  »

Dimanche, à Saint-Cyr, les parents de Michel Raillon seront faits Justes parmi les Nations, à titre posthume pour avoir caché une femme juive pendant 3 ans.

Cadre en retraite de la Sabla, Michel Raillon avait 13 ans quand ses parents (dans le cadre) ont accueilli Gabrielle Kahn-Hahnaux

 

 

Michel Raillon, un Saint-Cyrien de 83 ans, retraité de la Sabla, avait 13 ans en 1942. « Je me souviens parfaitement du jour où Mme Kahn est arrivée à la maison. Des amis de mes parents leur ont demandé de la cacher. Elle est restée chez nous, trois ans, jusqu’à la Libération… »

Les faits se sont déroulés à Montélimar, mais c’est dans la commune de Saint-Cyr-sur-Loire, où Michel et Nona, son épouse, vivent depuis 1960, que les parents de Michel Raillon seront faits Justes parmi les Nations, à titre posthume, dimanche matin.
Gabrielle Kahn-Hahnaux, qui avait une quarantaine d’années à l’époque, a pu échapper à la barbarie nazie grâce au courage de la famille Raillon, qui l’a cachée dans une pièce de sa maison, pendant trois ans.

Les voisins savaient mais n’ont rien dit

« Nous vivions dans une crainte permanente, partagés entre la méfiance et la discrétion la plus totale, se souvient Michel Raillon. Personne ne devait savoir. Mme Kahn était recluse chez nous et ne devait pas se montrer. Si un voisin posait une question, nous disions que c’était une cousine alsacienne, qui s’appelait Marie Becker, que nous hébergions. Car Mme Kahn parlait mal le français, avec un accent très prononcé. En fait, à la Libération, nos deux voisins les plus proches nous ont confié qu’ils avaient deviné que ce n’était pas notre cousine. Mais ils n’ont jamais rien dit. »
Depuis la libération, les familles Raillon et Kahn – luxembourgeoise – sont toujours restés liées. « Gaby » Kahn avait un fils, Marcel, qui avait 17 ans à l’époque et qui lui aussi se cachait dans la Drôme, avant de rejoindre les maquisards. « Il est venu voir sa maman, une fois, chez nous, début 1943. Je me souviens parfaitement de l’instant où ils se sont retrouvés. Nous ne nous sommes jamais quittés de vue avec Marcel Kahn, depuis tout ce temps. Il a 85 ans et il a souhaité, avant de mourir, que mes parents soient honorés pour ce qu’ils avaient fait. Yad Vashem a fait une enquête poussée pendant deux ou trois ans. Marcel sera présent dimanche. »
Michel Raillon n’a que très rarement évoqué ces faits, même à ses proches amis. « Mes parents n’ont jamais considéré d’avoir fait quelque chose d’héroïque. Ils l’ont fait parce qu’il fallait le faire. Bien sûr, ils savaient que si Mme Kahn était découverte par la police de Vichy, elle était déportée et sans doute nous avec. »
A la Libération, Gabrielle Kahn a retrouvé son mari et ses deux fils. Mais le reste de leur famille n’est jamais revenu des camps.
« Cette cérémonie de dimanche, je l’ai acceptée parce qu’il faut dire aux jeunes : soyez vigilants face aux nationalismes exacerbés et aux négationnisme qui ne demande qu’à renaître » soupire Michel Raillon.

Pascal Landré

source:http://www.lanouvellerepublique.fr/Indre-et-Loire/Actualite/24-Heures/n/Contenus/Articles/2012/11/24/Mes-parents-l-ont-fait-parce-qu-il-fallait-le-faire du 24/11/2012