Pour avoir sauvé des Juifs, les Cénou parmi les Justes

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Dossier n°

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Pour avoir sauvé des Juifs, les Cénou parmi les Justes

Ce matin à Agen, une cérémonie rend hommage aux Justes, ces hommes et femmes qui, au péril de leur vie, ont caché et sauvé des Juifs. Parmi eux, Fernand et Aurélie Cenou, de Bon-Encontre.


Fernand Cénou repose au cimetière de Bon-Encontre, sur une tombe adossée contre l’église de Saint-Ferréol./Photo Le Petit Bleu Jean-Michel Mazet.

À une date non encore fixée, les noms de Fernand Cénou et d’Aurélie Cenou-Bournac seront gravés au mémorial de Yad Vashem, sur une colline à Jérusalem, avec la mention de la ville et du pays d’origine : Bon-Encontre, France. Des arbres seront plantés en leur nom sur l’avenue des Justes.

Charron, agriculteur à sa façon, Fernand Cénou, né le 27 octobre 1879 au lieu-dit «Francès» à Bon-Encontre, était un homme solide aux idées radicales socialistes bien ancrées.

Nommés Justes en avril dernier

 

Son petit-fils, Roger Cénou, le décrit comme un homme, un entrepreneur original : «i l achetait des bulbes pour les vendre en Angleterre, ou, selon la saison, des arbres sur pied».

 

Accueillir une famille juive composée de huit personnes, dans les trois pièces de la maison qu’il possédait à Boé, en retrait de la RN 113, tout près de l’actuelle maison de retraite, faisait encourir un grand danger, en 1942. Le risque était total et assumé. Pour les Cénou qui habitaient la partie arrière de la demeure, ce n’était ni plus ni moins que la traduction du devoir d’êtres humains envers d’autres dont le nom, Lévy, les exposait à une mort certaine s’ils étaient capturés.

Le couple avait aménagé une porte de communication entre le refuge des pourchassés et leur logement pour assurer leur fuite à travers les champs de maïs en cas d’alerte. Une clochette, reliée par une corde au portail, devait signaler tout accès à la maison. De juillet 1942 à la Libération, les Lévy ont survécu grâce au concours d’un couple protecteur. Le père de Roger Cénou, Pierre, lui aussi résistant, a d’autant plus conservé le secret qu’il cachait dans sa maison des armes, des fusils-mitrailleurs dissimulés dans la cave… Dans le séjour, une carte du front russe était actualisée à l’aide de punaises pour suivre l’avancée des forces russes face aux troupes hitlériennes.

La guerre finie, le quotidien a repris le dessus. La page était tournée pour les Cénou, jusqu’à ce que Myriam Daigueperse, née Lévy, aujourd’hui âgée de plus de 92 ans, «prise de remords», dit-elle, décide de livrer son témoignage. Fin 2002, elle a retrouvé des cartes postales dans les dossiers de sa nièce, fille de sa sœur aînée Louna, cachée elle aussi dans la banlieue d’Agen.

Le maire de Bon-Encontre, Michel Lauzzana est contacté. Chargée de l’état-civil, Mme Volceneau remonte les pistes. Soixante ans après, fin décembre 2002, empreinte d’émotion, Myriam Daigueperse revient à Boé en compagnie du maire Guy Saint-Martin et de Roger Cénou. Le petit-fils découvre un pan caché de la vie de Fernand, persuadé que son action durant la guerre ne sortait pas de l’ordinaire…

«J’ai reconnu l’accès et les pièces principales qui ont servi d’abri à ma famille», peut-on lire sur l’attestation adressée au Mémorial de Yad Vashem. Les premières démarches du «dernier témoin de ce sauvetage courageux» pour faire reconnaître les Cénou comme Justes parmi les Nations sont entamées en 2002. Il aura fallu dix ans pour que la procédure aboutisse.

Le 23 avril 2012, Roger Cénou est officiellement informé par une lettre du mémorial Yad Vashem que ses parents sont nommés Justes pour avoir aidé à leurs risques et périls des Juifs pourchassés pendant l’Occupation.

Fernand Cénou est décédé le 5 juin 1954. Il repose au cimetière de Saint-Ferréol à Bon-Encontre, dans la terre d’une contrée paisible où l’honneur avait un sens.

Richard Hecht

source:http://www.ladepeche.fr/article/2012/07/22/1404825-agen-pour-avoir-sauve-des-juifs-les-cenou-parmi-les-justes.html du 22/07/2012